Les ASSOCIATIONS                   et                 Pierre-Emmanuel NEUROHR,

Paillons Environnement                                Directeur du CNIID

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Pour la Terre

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COMPTE RENDU DE LA CONFERENCE DEBAT

Sur la Réduction des Déchets Toxiques

(Prévention de la pollution et développement durable)

donnée le 7 avril 2004 à CONTES -ALPES MARITIMES (06)

par Docteur KEN GEISER

Directeur du TOXICS USE REDUCTION INSTITUTE au MASSACHUSETTS

(à l'origine de la Loi sur la Réduction des déchets toxiques au Massachusetts)

 

 

 

Dr. Ken GEISER : Je regrette énormément de ne pas pouvoir parler français.  Je suis très heureux d’être ici avec vous. La lutte contre le problème du traitement des déchets et, le problème encore plus grave des déchets dangereux, est une lutte mondiale qui se retrouve à toutes les échelles et dans tous les pays. J’ai plusieurs fois fais le voyage autour du monde et visité beaucoup de pays différents qui se retrouvent exactement avec les mêmes genres de problèmes que nous avons a résoudre et qui sont les nôtres aujourd’hui.

 

J’ai été en Thaïlande aux Philippines, en Chine, Mexico et récemment en Irlande. Dans  chacun de ces pays, j’ai vu des situations totalement identiques à votre lutte, mais une que je n’avais pas encore vue, c’est une cimenterie dans les vallées, ça je l’avais encore jamais rencontrée. Mais chaque fois, ce que j’ai pu rencontrer comme problème, ce sont les cas où les gouvernement et les industries essaient de mettre de mettre en place des incinérateurs de déchets dangereux, mais les citoyens prennent sur eux même pour soulever le problème et poser des questions aux gouvernements, critiquer leurs industries concernant le problème du devenir de ces déchets. Trop souvent nous voyons des gouvernements qui n’ont pas envie de faire face à ce problème et ce sont les groupes de citoyens et les associations qui font bouger les choses, qui soulèvent les questions et qui se battent vraiment pour l’avenir de l’environnement et la santé publique. Que je puisse vous dire ce que vous pensiez faire de votre vie :

 

Vous êtes des guerriers vous battant, en même temps,  avec d’autres guerrier partout dans le monde, en essayant de trouver une solution pour ces problèmes de déchets car les gouvernements et vos industries sont faible, plus faibles que vous.

 

Laissez moi vous dire quelques éléments de réflexion par rapport à six choses que j’ai vues durant la dernière heure et demie que j’ai passée ici.

 

Je vais les lister :

 

-        Je vois:

       - un problème technique,

      Un problème environnemental,

  - Un problème de transport,

  - Un problème légal

  - Un problème économique,

  - et un problème politique.

 

Donc vous avez beaucoup de problèmes auxquels vous devez faire face. Laissez moi commencer par le début.

 

Le premier c’est un problème technique. Ce que l’on a ici, à Contes, c’est une cimenterie. D’après ce que j’ai compris cela fait plus de cent ans que cette usine fonctionne dans la localité. En fait, l’humanité a fait du ciment depuis des milliers d’années. Faire du ciment ce n’est pas forcement de la high-tech, ce n’est pas très innovant. On utilise du calcaire et des matériaux de base pour faire du ciment depuis des siècles. Ce n’est pas nécessairement un procédé de fabrication propre, mais la plus grande question par rapport aux risques ce sont souvent les combustibles. Si le combustible est propre, normalement vous n’avez pas trop de problèmes par rapport aux produits finis qui ressortent de l’usine. Malheureusement, très souvent, les combustibles ne sont pas propres.  D’après ce que j’ai compris certains des combustibles utilisés ici sont des goudrons et des résidus  de raffineries. Je vais commencer par dire que ceci crée un problème technique, parce que les goudrons issus des raffineries sont souvent des éléments très complexes et c’est pourquoi vous devez faire très attention par rapport aux températures auxquelles vous les brûlez. Par rapport au fait d’utiliser des goudrons et différents résidus de raffineries pour les utiliser en tant que combustibles dans une cimenterie,  cela ce voit assez souvent autour du monde, mais cela ouvre la porte à d’autres opérations où l’on va ajouter d’autres produits toxiques. Beaucoup de procédés industriels que l’on utilise aujourd’hui sont à la source de la génération de déchets toxiques. Ces déchets toxiques sont très onéreux à traiter qu’il s’agissent de l’incinération ou de la mise en décharge et l’on se rend compte que le procédé d’incinération en cimenterie offre une magnifique manière de faire cela pour très peu cher. Les températures sont très hautes, a priori il y a une grande expérience par rapport aux faits de brûler des matériaux, il est possible de faire de l’argent grâce aux traitements des déchets. Mais les déchets toxiques qui peuvent entrer dans une telle usine sont des mélanges de déchets on m’a dit qu’ici il y aurait des déchets tels que les huiles usagées, des déchets de l’industrie des parfums, des déchets de l’industrie photographique et également des boues de stations d’épuration. Tous ces déchets brûlent à des températures différentes, ce qui fait que lorsque vous mélangez ces différents déchets, vous avez la génération de fluide à différents moments qui font en sorte qu’il est très difficile d’avoir l’opération en continu de combustion. Donc même si vous avez un système de management très fort et des gens qui ont été bien formés, c’est beaucoup plus difficile de garder une température stable durant le procédé et donc c’est plus difficile de ne pas générer des éléments toxiques à la fin du procédé d’incinération.

 

CA C’EST LE PROBLEME TECHNIQUE.

 

L’autre problème que je vois c’est un problème environnemental.

 

Je viens de voir une vallée magnifique, très à pic, avec des villages en haut et en bas de la vallée. La vallée va dans la mer ce qui veut dire que selon certains moments de la journée les vents vont aller vers le haut ou vers le bas de la vallée, donc les courants d’air seront différents selon  les saisons et selon l’heure de la journée. Ce qui veut dire que les éléments qui  sont envoyés dans l’air, au sein de la vallée,  se retrouvent sur des courants d’air qui sont impossibles à prévoir. Donc on dilue les contaminants dans l’air et dans le vent et c’est très difficile de savoir où cela va aller. Il est aussi très difficile de dire quel sera l’endroit qui sera le plus risqué ; est-ce les gens qui habitent sous les vents dominants, en haut de la vallée ? en bas de la vallée ? Il y a aussi des problèmes par rapport à la déposition de ces éléments toxiques sur la terre, à  un moment ou à un autre, les éléments toxiques qui sortent d’une opération de combustion comme celle-ci, vont à un moment ou à un autre se déposer soit sur la terre soit sur des arbres. Il y a des positions sur la terre et il est difficile de prévoir comment cela va se passer. Si vous avez des officiels gouvernementaux très efficaces et des scientifiques qui ont un esprit critique même, comme cela, il est encore très difficile de savoir où seront les endroits les plus risqués et les plus exposés.

 

C’EST UN PROBLEME ENVIRONNEMENTAL.

 

Le troisième problème que j’ai constaté, c’est un problème de transport. Ce que j’ai vu c’est que tout ce qui concerne le transfert par camions vers et en dehors de l’usine Lafarge,  il y a juste une option : c’est une seule route qui va le long de la vallée. Cela veut dire que certainement tout le ciment va passer par cette route mais, si je devine correctement, cela veut dire  que tous les déchets toxiques devraient également passer par cette même route vers le haut de la vallée. Cette route a une dénivellation importante et étroite, avec des maisons très proche et  une rivière juste au bord. C’est une invitation, en quelque sorte, à beaucoup de problèmes, si jamais il y a des fuites par rapport aux camions, ou si il y a des accidents sur la route. S’il y avait une fuite, le long de la route par exemple, il y a de grandes chances que cela aille dans la rivière et cela poserait des problèmes supplémentaires par rapport à la continuation de la circulation qu’il faudrait gérer et ceci n’est pas quelque chose d’inhabituel dans une situation telle que celle là. Je dirais que j’ai rarement vu des transports de déchets dangereux dans une vallée aussi encaissée et,

 

CA C’EST LE PROBLEME DES TRANSPORTS.

 

Le problème légal s’y ajoute. La question c’est qui donne l’autorisation à l’usine, qui inspecte l’usine et quelles sont les capacités  et l’engagement des officiels de l’Etat à vérifier comment cela se passe pour le maintien de la combustion des déchets. Habituellement il va y avoir une agence gouvernementale qui va réaliser une évaluation d’impact ou qui va au moins regarder ce que l’usine va réaliser en terme d’évaluation d’impact.  Sur cette base il y a un permis qui pourrait être donné, qui contient certaines conditions qui doivent être respectées en théorie  par  rapport à l’accès à l’usine et la manière de brûler les déchets. Mais, je devinerais éventuellement, que comme dans beaucoup de pays, la France ne donne pas suffisamment de moyens économiques aux inspecteurs  des installations classées ; ce qui fait que les inspections et la surveillance gouvernementales sont parfois plus faibles, que ce que nous voudrions. Ceci est un problème si c’est une cimenterie, mais cela devient un problème beaucoup plus important si on parle ensuite d’une usine de traitement de déchets toxiques parce que les inspections doivent être beaucoup plus rigoureuses et beaucoup plus fréquentes. Vous pouvez avoir des autorités très rigoureuses, des inspecteurs très rigoureux qui suivent l’usine ils auront du mal à remplir leurs fonctions de manière efficace.

 

CA C’EST LE PROBLEME LEGAL

 

Maintenant on parle de problèmes économiques. Les déchets toxiques c’est un petit peu comme n’importe quel produit. Cela a une valeur marchande. En  d’autres termes, cela a un prix et l’industrie essaie de faire baisser ce prix. Les entreprises de traitement de déchets, bien entendu, essaient de proposer les prix les plus bas possible à leurs clients  et elles cherchent à trouver les moyens de traitement qui sont les moins chers possibles. L’une des grandes transitions qui a eu lieu durant les dernières années c’est le marché géographique des déchets. On se rend compte maintenant que les déchets toxiques sont parfois transportés sur de longues distances et même à travers le monde. La vallée qui borde Contes se trouve sur la côte, ce qui fait qu’elle est ouverte pour un marché potentiel lucratif par rapport à l’implantation de déchets toxiques, pas seulement les déchets français mais des déchets de l’ensemble des pays riverains de la méditerranée et d’ailleurs. Donc il y a actuellement une partie des déchets qui sont présentés comme venant de distances pas très grandes, qui sont assez voisines, une fois que vous ouvrez la porte, vers un marché des déchets, il est très probable que la demande augmente. Si on regarde où l’on en est dans cinq ans, quand l’entreprise dira qu’elle a besoin d’avoir accès à plus de déchets, parce que le prix des combustibles a encore augmenté, à tel point que le traitement de déchets toxiques est  le fonctionnement économique de l’usine a peu près autant que la production de ciment. Vous vous retrouvez avec des situations très bizarres, avec des entreprises de cimentiers qui vont vous dire qu’ils ne peuvent pas survivre économiquement, sans le traitement des déchets toxiques, et que  la seule manière de faire continuer le fonctionnement de l’usine c’est d’augmenter de plus en plus l’importation de déchets toxiques. Donc, même si les responsables de l’usine actuels sont honnêtes par rapport à ce qu’ils disent : « ils veulent prendre uniquement un tout petit peu de déchets toxiques » le marché pourrait les amener éventuellement, à un moment donné, à prendre plus de déchets toxiques et,

 

CA C’         EST LE PROBLEME ECONOMIQUE.

 

 

Et maintenant laissez moi vous dire quelque chose par rapport au sixième problème, le problème politique. Vous vous attendez à ce que le gouvernement cherche votre propre intérêt et défende votre santé ; mais les politiques doivent tout regarder : l’intérêt économique  de la région, le fait de donner du travail, qu’il y ait des emplois et ces problèmes là sont en conflits direct avec  les problèmes de la santé publique. La question qui se pose c’est jusqu’à quel point faut-il conserver les industries qui polluent et qui rendent les gens malades par rapport aux emplois. Au départ ce qui leur semble un tout petit groupe de citoyens, qui sont très bruyants et, qui leur créent des problèmes. Donc,  pour un politicien qui devrait vérifier tous les intérêts de toute la région et avant tout la santé  publique, des gens comme nous ne sommes que des fourmis, là pour créer le trouble et donc on nous oublie facilement.

 

Nous le savons que nous cherchons à protéger la santé, non seulement de nous même, mais la santé générale de tous et ceux qui n’ont pas la possibilité de voter en ce moment, comme les enfants.  Le problème c’est  comment un petit groupe de personnes qui croient dans les valeurs  de la santé et de l’environnement, comment est-ce que  ces personnes peuvent effectivement se faire entendre auprès  des politiciens qui ont des intérêts différents  et,

 

CA C’EST LE PROBLEME POLITIQUE.

 

 

SIX PROBLEMES ASSEZ SINISTRES.

 

 

Ce sont ces six problèmes là qui me sont apparus lorsque j’ai examiné la situation. Maintenant, vous n’êtes pas venus pour entendre parler de vos problème, mais vous êtes certainement ici pour entendre parler de solutions je voudrais vous laisser avec de l’espoir et des suggestions d’actions  pour arriver justement à court-circuiter ces problèmes et à les dépasser. Je voulais vous parler de mon programme  en confrontant les déchets avec une approche différente de celle des politiciens qui sont en vigueur actuellement.

 

Pendant les années 80 dans mon Etat,  le Massachusetts,  avait à résoudre les mêmes genres de problèmes que ceux auxquels vous êtes confrontés, que vous avez là. Nous avions à résoudre un mélange industriel , nous avons toujours ce mélange industriel au Massachusetts  avec des usines électriques - de télécommunications – plastiques … tout ceci contribue à la prospérité de notre Etat, mais aussi ces industries  produisent beaucoup de déchets dangereux. Nous savions aussi que beaucoup de ces déchets étaient déposés illégalement dans les rivières et dans la terre, le gouvernement a été mis sous pression pour agir, c’est à dire, le conseil régional. Il a été décidé de  construire des très grands incinérateurs afin d’y brûler les déchets. Ceux qui vendent les incinérateurs sont allés au Massachusetts, afin d’y construire des incinérateurs. Le problème c’était le lieu, trouver des lieux où il n’y ait pas un problème de santé publique. A chaque fois qu’il a été trouvé un endroit idéal pour placer des incinérateurs, cela a été contrecarré par la résistance des associations locales, les municipalités locales et pendant trois années l’Etat, à chaque fois, a essayé de trouver un endroit où placer les incinérateurs  et, à chaque fois, les citoyens se sont mobilisés et ont résistés et ont forcé l’Etat ou le Conseil Régional à repenser sa stratégie et à abandonner les incinérateurs. Nous étions dans une situation de blocage, nous savions que nous devions faire quelque chose concernant les déchets ; l’industrie  voulait des incinérateurs mais les communautés et les associations de protection de l’environnement ne le voulaient pas. Personne à l’époque ne se posait la question de savoir pourquoi nous avions autant de déchets, le problème étant : une fois que nous avons les déchets qu’est ce que nous en faisons ?  Donc un petit groupe de personnes se sont réunies pour réfléchir à une autre manière de résoudre le problème des déchets. Nous avons choisi de poser la question :

-        Pourquoi est ce que nous avons des déchets dangereux ?

-        Est ce que nous devons avoir des déchets dangereux ?

 

Si nous étions intelligents, est-ce qu’il serait possible de trouver des moyens pour faire diminuer le volume des déchets dangereux et de changer les constituants chimiques pour que ces déchets ne soient plus dangereux et le faire à une échelle suffisamment importante pour que nous n’ayons pas besoin des incinérateurs. L’histoire est très longue et complexe et je ne veux pas vous ennuyer avec les détails. Sur une période de trois années nous avons rencontré les politiciens locaux pour leur parler d’une autre solution, les questionner. L’idée était de réduire à l’entrée de l’usine, l’utilisation de produits chimiques toxiques, afin de  réduire les déchets toxiques qui sortent de l’usine. Quand on a regardé le problème on s’est rendu compte que le Massachusetts avait six cents à sept  cents grandes  entreprises qui produisaient des déchets toxiques et il fallait donc convaincre six cents à sept cents entreprises de nous laisser regarder alors leurs procédés de fabrication. Nous étions à peu près six, on comprenait que cela n’allait pas marcher donc, il fallait trouver un moyen de convaincre les entreprises elles-mêmes, de regarder leurs procédés de fabrication, et donner les moyens aux cerveaux les plus brillants dans les industries, dans les universités de regarder les moyens de réduire les déchets à la source.

 

Ce qu’on a fait, c’est faire un projet de loi qui a reçu l’aval des groupes de citoyens et des associations de protections de la nature. Ces gens là sont allés voir les élus et en 89, après quatre mois et demi de négociation intenses, on a réussi à faire en sorte que beaucoup d’entreprises acceptent ce projet de loi et donc on a pris ce projet de loi et on l’a amené devant la législature  du Massachusetts et parce que il y avait derrière ce projet les militants pro-environnement, les militants en faveur de la santé publique et des industriels, on a réussi à faire en sorte que ce projet de loi soit passé et soit accepté par la législature très rapidement. Je ne peux pas vous parler de tous les détails ici, mais ce à quoi on s’est engagé c’est de promettre à la législature qu’on arriverait à diviser par deux la production de déchets toxiques en dix ans. Et nous nous sommes engagés à travailler avec l’industrie pour atteindre ce but. La manière dont cette loi fonctionne, ça consiste à demander, en fait à obliger les quelques six cents entreprises du Massachusetts à faire un rapport annuel sur les produits chimiques toxiques qu’elles utilisent. On s’est concentré sur 190 produits chimiques hautement toxiques et tous les deux ans les entreprises étaient obligées de faire un plan sur la manière dont elles pourraient réduire l’utilisation de ces produits chimiques toxiques. On a aussi obligé les entreprises à payer une taxe chaque année, taxe basée sur le nombre de produits chimiques toxiques qu’elles utilisent et cet argent est allé dans un fond spécial qui pouvait être uniquement utilisé pour ce programme. Cela a permis de financer les activités gouvernementales et également des activités d’université afin de présenter et de donner des services aux entreprises, on a par exemple fait de la formation aux gens qui travaillent dans l’industrie, nos ingénieurs sont allés dans les entreprises et ont proposé de l’aide spécifique à chaque entreprise. On a fait en sorte de travailler avec les facultés et les universités pour faire de la recherche sur les problèmes particulièrement complexes. On a mis en place une librairie interactive sur le net où les gens pourraient trouver des réponses sur les questions de technologie particulièrement innovantes et on a également  financé des micros projets, menés par les associations de citoyens, afin qu’elle se mettent en liaison avec les petites et les moyennes entreprises pour les aider au fur et à mesure qu’elles tentaient de réduire l’utilisation de produits chimiques toxiques et donc on a mis en place une relation totalement neuve entre les groupes de citoyens et les entreprises. En fait les gens au lieu de se chamailler les uns et les autres ont trouvé une manière de travailler ensemble.

 

Je pense que votre challenge et mon challenge pour le futur c’est de travailler avec les industries, avec les officiels gouvernementaux, les officiels responsables de la santé publique et de l’environnement afin de faire en sorte d’être sur que nous avons vraiment une activité économique viable  mais sans utiliser la même quantité de produits chimiques toxiques. Je pense qu’il est possible pour nous tous de travailler ensemble les citoyens, les industriels, les responsables gouvernementaux afin de mettre en place un monde qui nous plaise vraiment, un monde qui est sans danger, qui est propre, qui est bon et en même temps un monde qui est fort  d’un point de vue économique.

 

C’EST MON HISTOIRE.

 

Pierre-Emmanuel NEUROHR, directeur du CNIID : Lorsque KEN GEISER parle de travailler main dans la mains avec l’industrie c’est l’industrie qui produit les objets de consommation et non pas les industries de traitement de déchets. Justement l’idée c’est de ne plus rester au niveau de l’aval mais d’aller en amont et de voir avec les gens en amont comment il est possible d’éviter de produire des déchets au départ. Maintenant,  je vais poser la question par rapport aux cimentiers.

 

Dr. Ken GEISER Il est très  habituel d’entendre l’industrie du traitement de déchets dire qu’elle est dans un business de protection de la nature et si on comparait cela au simple fait de déposer des déchets dans une rivière ou sur la terre cela peut être logique. Mais à mon avis j’argumenterais que c’est une manière très inefficace de traiter les déchets que de passer par ce type de traitement. Il est bien plus efficace d’approcher le problème par rapport aux procédés de fabrication à l’intérieur de l’usine plutôt que de voir ce qui se passe une fois que les déchets ont été produits et qu’ils sont renvoyés à l’extérieur. Simplement  prenons l’exemple des déchets photographiques. Donc dans une telle industrie qui produit des déchets photographiques il y a des stabilisateurs, des fixateurs, d’autres éléments toxiques. Il y a des éléments argentés avec de l’argent dedans qui ont une très grande valeur, il y a beaucoup de raison de réutiliser et de recycler ces éléments là, à l’intérieur du procédé de fabrication, dans l’usine elle-même et, ce qui peut se passer également, c’est que dans certains cas, comme dans mon état du Massachusetts, il y a des entreprises qui récupèrent les éléments tels que les fixateurs et elles font de la régénération de ces fluides et ils les revendent à l’industries photographiques et les entreprises qui travaillent dans ce domaine connaissent très bien leurs procédés de fabrication et sont capables de savoir comment réutiliser  ces produits. Si au lieu de cela vous prenez ces éléments comme les développeurs, les fixateurs et vous les envoyez à l’extérieur, vers l’usine qui va mélanger cela avec des huiles, avec des résidus de broyage automobiles et, qui plus est, va mélanger cela avec des déchets médicaux et d’autres résidus, je dirai que quels que soit les arguments avancés par l’industrie de traitement de déchets comme quoi elle serait écologique en aucun cas on ne peut comparer cela avec la récupérations, la régénération des éléments utilisés dans le domaine de l’industrie de la photographie. Une phrase que l’on entend souvent, par rapport aux  industries de traitement de déchets, tant que les déchets sont bien triés et distincts, on peut réussir à les traiter de manière efficace, dès le moment où ils sont mélangés, vos options et les coûts associés vont s’amenuisant et les coûts augmentent. 

 

Je vous demande de m’informer ainsi par rapport à la structure gouvernementale française, depuis les quelques jours que je suis arrivé en France, j’apprends beaucoup de choses sur la France. Bien entendu lorsque vous avez d’un côté la même agence à qui l’on demande de faire du développement économique et la régulation vous avez un problème et, je pense, que c’est comme lorsque l’on demande au renard de faire attention au poulailler. Aux Etats-Unis, on fait une séparation entre les deux. On a d’un côté des agences qui s’occupent du développement industriel et de l’autre côté, au niveau fédéral et au niveau de l’Etat, on a des agences qui s’occupent de la régularisation du système.  Ce n’est pas une situation vraiment satisfaisant parce que la plupart du temps les agences environnementales sont plus faibles mais au moins, elles ont de l’autonomie,  elles sont séparées.  D’un autre côté, dans le domaine de l’agriculture, le ministère de l’agriculture et le département qui s’occupent du contrôle des pesticides sont les mêmes et vous pouvez voir le résultat qui est de piètre qualité puisqu’il y a une utilisation très importante des pesticides aux Etats-Unis. J’ai entendu parler  de cas très intéressant par rapport à l’agriculture biologique en France, c’est encore plus dur aux Etats-Unis parce que justement il n’y a pas de séparation entre les deux pouvoirs.

 

Roger RICCIARDI de l’Association PAILLON VERT : Je me pose la question de l’intégration de tous les déchets qui vont être introduits dans les fours et en plus des scories qui sont générés directement dans le ciment. Donc si vous voulez, moi je rajoute un problème supplémentaire au tableau assez noir que vous avez soulevé  c’est un problème de consommation. Je voudrais savoir si vous eu connaissance  d’autres problèmes identiques ailleurs et qu’est ce que cela représente comme danger dans le sens ou ces gens là (Lafarge) disent carrément que le ciment piège littéralement tous les produits chimiques toxiques comme si le ciment était à ce moment là comme une sorte de coffre-fort et qu’il ne génère pas de cendre de combustion. En fait,  ce sont de véritables magiciens, non seulement ils détruisent les déchets mais en plus ils font disparaître ce que l’on appellent les déchets ultimes, ils s’en vantent d’ailleurs en disant : »il n’y a plus de déchet du tout, on a tout fait disparaître ». Le seul problème : ils partent sur le  principe qu’ils vident les décharges mais, en quelque sorte, on se rend compte quand même  d’un chose, c’est que les décharges cela va devenir les murs de nos habitations. Qu’est ce qui va se passer là parce qu’ils parlent de coffre-fort mais je connais les clefs des coffres-forts, cela s’appellent : perceuses marteaux piqueurs, rainureuses, disqueuses, etc. Il y a là un problème de santé publique absolument majeur, du type de celui de L’AMIANTE, qu’est ce que vous pourriez nous dire  à ce sujet là et qu’est ce qu’il y a actuellement parce que j’ai l’impression que ces procédés là existent déjà dans le monde entier,  y compris aux Etats-Unis. Est—ce qu’il y a quelque chose qui est fait par rapport à cela ?

 

Dr. KEN GEISER  Une fois que vous avez les déchets toxiques sur les bras vous allez toujours chercher un endroit où mettre ces déchets toxiques. Il y a des collègues à moi dans les universités qui passent leur temps à essayer de trouver une manière d’encapsuler les déchets afin qu’ils restent bien sagement là où ils sont. J’ai vu des recherches ou l’on essaye de capturer ces éléments dans des céramiques ou dans du verre, il y a beaucoup d’études qui sont faites afin de mettre ces éléments dans le goudron des routes et le fait de mettre ces éléments toxiques dans le ciment procède de la même approche. Et  donc l’idée est bien évidemment d’encapsuler ces éléments toxiques dans le ciment afin qu’ils n’en ressortent jamais. A ce moment là on va devoir faire beaucoup, beaucoup de ciment. Je sais que par exemple il y a eu, au minimum,  un cas particulièrement important aux Etats-Unis il y a des gens qui ont mis des déchets radioactif dans du ciment et cela a été utilisé pour faire des maisons et bien entendu au fur et à mesure que la radio activité était relarguée, les maisons sont devenues invivables et ces maisons ont dû être rasées

 

Je sais qu’il y a aussi des preuves par rapport au vieillissement du ciment,  donc il y a un vieillissement parfois si le ciment est mal conçu, il y a un vieillissement accéléré rapide du ciment et donc il y a des poussières qui se dégagent. Il y a des références qui montrent que les produits chimiques qui se trouvaient à ce moment là dans le ciment sont relargués dans l’atmosphère que l’on respire. Ce qu’il faut aussi savoir c’est que le béton sèche et se solidifie très lentement et au début du processus il peut donc y avoir tous les éléments volatiles qui peuvent se dégager et beaucoup de cette volatilisation de produits toxiques se passent durant les deux premiers jours et cela peut durer des années. Donc, même si à travers le temps cette volatilisation baisse, elle continue et vous allez donc toujours avoir des rejets faibles mais des rejets quand même de polluants toxiques.

 

Si ces ciments étaient faits à des températures très importantes vous n’auriez pas beaucoup d’éléments volatils mais, malgré cela, il peut rester des éléments volatils qui n’ont pas été détruits lors de la fabrication et qui vont être relargués dans les maisons par exemple. Comme vous l’avez dit il y a différents éléments qui peuvent être relargués ce que j’ai mentionné, ce que vous avez mentionné  par rapport à la perceuse. Il y a aussi le fait de construire ou de démolir une maison. Ce bâtiment ici a été fait avec un certain ciment et je pense qu’à un moment ce bâtiment où nous nous trouvons, sera démoli et qu’est ce qu’on va faire des déchets de construction ou plutôt que vont faire nos enfants ou les enfants de nos enfants avec ces déchets de construction. 

 

Monique ALDUINI Présidente de l’Association PAILLONS-ENVIRONNEMENT Professeur votre réponse est particulièrement intéressante et  je vous demanderais spécialement de bien vouloir redonner toutes ces explications et toutes ces informations d’une part en conférence de presse que vous allez donner tout à l’heure et, d’autre part à la conférence elle- même ; parce que ce sont des éléments que nous mettons en avant pour nous battre contre l’incinération des déchets en cimenterie quel que soit le cimentier et nous sommes très peu entendus sur ce point. Par ailleurs, je souhaite vous poser une question embarrassante mais tous les gens qui se sont déplacés ce soir sont venus dans l’espoir de repartit avec une méthode ou une recette pour se battre contre les industriels pollueurs et en particulier contre l’incinération, que cela soit en cimenterie ou autre« Il paraît, me dit-on dans la salle,  qu’il n’y a jamais de recette mais moi, je crois qu’il y a une méthodologie et, si vous pouviez nous en parler en trois mots professeur ».

 

Dr. KEN GEISER :   Que  le peuple décide

 

Pierre-Emmanuel NEUROHR, directeur du CNIID  En anglais cela fait trois mots mais, en français, cela ne marche pas en trois mots. Je voulais aussi vous dire que peut être une manière que les choses avancent, cela vous l’avez compris vous êtes tous du monde associatif, c’est de travailler ensemble et je vous invite à prendre connaissance du fait qu’il y a un réseau associatif national qui s’appellent la Coordination Nationale pour la Réduction des Déchets à la Source qu’anime le CNIID, on sert de secrétariat et cela permet de faire circuler l’information. Par exemple on était à Bruxelles il y a un ou deux jours, mais dans la partie française de la Belgique il y a des groupes d’opposants à des cimenteries qui veulent, à elles deux,  brûler un tonnage qui dépasserait le million de tonnes annuel et donc, on va essayer de faire en sorte de mettre en réseaux les gens. Il faut travailler en réseaux car  on  est plus fort ensemble. Actuellement au CNIID il y a 230 associations et fédérations d’associations qui travaillent main dans la main dans cette coordination nationale. 

 

Extrait de "Nice-Matin" du 8.4.2004

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