Monsieur le Président de la Commission d’enquête

Centre Administratif des Alpes-Maritimes

Direction des Actions Interministérielles

Mission Aménagement et Environnement

Route de Grenoble

06 286 NICE Cedex 3

 

Après avoir étudié les différentes mesures proposées dans le Plan ainsi que les éléments de justification développés dans le dossier, l’Association Paillons Environnement approuve  dans l’ensemble les principales mesures à l’exception du chapitre relatif à l’incinération, (et en particulier  l’incinération des déchets industriels).

 

Nous approuvons et nous appuyons les objectifs et les orientations données dans le plan concernant :

 

-   le compostage 

-   la valorisation matière

-   le recyclage

-   l’incinération de papier, carton….  ( envisageable dans certaines limites, et après avoir pris en considération les possibilités de recyclage et le compostage)

-    le stockage (déchets ultimes…)

 

Par contre l’élimination des déchets industriels par incinération ou co-incinération pose un certain nombre de problèmes environnementaux allant à l’encontre du développement durable, et en particulier  la lutte contre l’effet de serre…..

 

 . L’incinération de déchets industriels et des huiles usagées

 La proposition d’utilisation de l’incinération pour l’élimination ou la valorisation des déchets industriels et des huiles de vidange pose de graves problèmes et est incompatible avec toute idée de développement durable.

 

Il semble que les données et justifications invoquées dans le dossier soient trop anciennes, caduques ou mal adaptées.

En particulier, en page 6 le plan mentionne que les résidus de stations d’épuration  « ont pour débouché des  fours de cimenterie »

 

Cette assertion est totalement aberrante pour les raisons suivantes :

-        Il n’existe que deux cimenteries dans le département. La plus importante, Vicat, située à La Grave de Peille, commune de Blausasc, n’a jamais demandé de pouvoir brûler des déchets est n’est pas habilitée à le faire. L’autre cimenterie, Lafarge avait effectivement obtenu une autorisation de brûlage de déchets, mais qui avait été annulée par le Tribunal administratif de Nice pour risque de pollution. (présence d’une cheminée non filtrée et non mentionnée)

 

-        Contrairement à ce qui est affirmé en page 18 du Plan, l’Usine Lafarge n’a pas d’agrément pour incinérer des huiles usagées.

En outre, l’incinération des déchets en cimenterie à Contes  pose un grave problème de transport.

 

En effet, la vallée du Paillon de Contes est caractérisée par une circulation souvent totalement saturée,  à travers des zones de plus en plus urbanisées. Les accidents, versements de marchandises ou de camions sont quasi-quotidiens.

           

Pour éviter d’accroître ces difficultés de transport, il faut traiter les déchets de l’industrie chimique de Grasse (dite « parfumeurs de Grasse »),  dans les environs de Grasse.

           

Selon des rumeurs persistantes, la ville de Grasse aurait construit une usine de traitement pour ses déchets qui, pour des raisons mystérieuses, n’aurait jamais fonctionné,…

           

Cela n’a pas empêché le lobby des industriels de Grasse d’invoquer le principe de proximité pour envoyer leurs déchets  à Contes.  Auparavant les déchets chimiques de Grasse (déshydratés au préalable)  étaient envoyés au rythme d’un camion par semaine dans les Bouches du Rhône ou se trouve une usine de traitement adaptée.

 

La même société Lafarge a déposé un nouveau dossier d’enquête publique au printemps 2004. Les éléments apportés par cette enquête montrent que cette cimenterie est totalement inapte à l’incinération de déchets.

 

L’incinération est incompatible avec les principes fondamentaux définis dans le code de l’environnement afin de permettre un développement durable :

 

. Principe de précaution :

 L’incinération, en particulier dans les phases d’allumage ou au cours d’incidents (très nombreux à l’usine de Contes), génère des rejets polluants proportionnels à la quantité de déchets incinérés.  En raison de la situation géographique de l’usine, au fond d’une vallée étroite, ces rejets polluants ne peuvent pas être dispersés par le vent. De plus des phénomènes d’inversion de température, particulièrement fréquents dans la vallée du Paillon, contribuent à maintenir les polluants dans la vallée (voir photo ci-dessous). L’énorme quantité d’eau rejetée par l’usine provoque des retombées de ces polluants dans des zones de plus en plus peuplées. 

 

En résumé, l’incinération des déchets se heurte à trois problèmes majeurs : la densité de population, en augmentation constante, le développement de l’agriculture de terroir (AOC oléicole, etc.)  , une situation aérologique totalement défavorable. Toutes les normes admises actuellement, les tests, et autres expérimentations sur d’autres sites ont été faits en zone de plaine, bien moins peuplée…

 

. Principe d’action préventive et de correction, par priorité à la source des atteintes à l’environnement :

 

   Des mesures faites à l’initiative de la société Lafarge, ont montré déjà la présence de polluants dans les sols et les végétaux, olive…(dioxines, métaux lourds…). La nature des polluants mesurés est caractéristique de l’incinération. Nous en concluons que l’activité de l’usine est elle-même source de pollution : la réduction à la source des pollutions implique une réduction de l’activité de cette usine et non de la transformer en incinérateur…

  

. Principe pollueur payeur :

  C’est tout le contraire, l’usine Lafarge qui pollue visiblement l’environnement (photo ci-dessous), a été rémunérée pour la destruction de déchets : nous sommes à l’opposé du pollueur payeur.

 

 

 

Ce principe « pollueur payeur » ne doit pas rester qualificatif mais devrait être appliqué avec rigueur comme le fait la Norvège où la gestion des déchets industriels et commerciaux est placée sous la seule responsabilité des entrepreneurs ainsi les producteurs de déchets ont un intérêt économique à réduire à la source leur volume de déchets et n’incinèrent ou ne mettent en décharge que très peu de déchets car ils sont pour cela très fortement taxés.

 

Il est inutile de créer de nouvelles taxes comme celle citée page 22, « redevance spéciale DIB » qui in fine s’ajoutent au prix du produit payé par le consommateur sans résoudre les problèmes.

 

La réduction des déchets passe obligatoirement par une réduction à la source y compris des produits toxiques de base utilisés par les industries et remplacés par des produits pas ou moins toxiques (se référer aux méthodes employées au Massachusetts et dans dix pays des Etats-Unis où l’utilisation de produits toxiques et la production de déchets toxiques a été réduite de 50 % - conférence Ken Geiser, le 7 avril 2004 à Contes-)

 

Aujourd’hui, l’incinération comme moyen de réduction des déchets rejetés dans l’environnement, n’est du tout d’actualité, et se révèle même totalement aberrante sous l’angle des considérations concernant le développement durable : en effet cette méthode consiste à remplacer des déchets visibles au sol, par des rejets atmosphériques, certes moins visibles mais bien plus insidieux, et à terme catastrophiques. 

Ces rejets atmophériques ont deux devenirs possibles

. soit retomber au sol et sur les végétaux sous forme de poussières ou bien de pluies contaminées (pluies acides, etc…)

. soit contribuer à la modification de l’atmosphère dont les effets s’accentuent de jour en jour : maladies respiratoires, surmortalité (il convient de retirer des effets directs de la canicule de 2003, un pourcentage élevé de victimes attribué par les médecins à la pollution de l’air – les conditions caniculaires ayant eu pour effet de bloquer le renouvellement atmosphérique dans les villes). A ces effets sur la santé humaine, il faut bien sûr rajouter le problème  crucial de l’effet de serre.

 

 L’incinération ou la co-incinération de matières riches en eau, et par conséquence non ou moyennement combustibles (ex : boues d’épuration…) nécessite  une augmentation de la combustion d’autres matériaux, ce qui ne peut qu’entraîner une forte augmentation des gaz à effet de serre (CO2, H2O,  CO…)

Nous attirons en particulier l’attention sur le problème des huiles de vidange ramassées en conteneurs de récupération : une étude de l’ADEME a montré que ces huiles contiennent souvent des substances indésirables, comme tout simplement de l’eau (liquides de refroidissement par exemple…)  La conséquence en est une mauvaise combustion et une perte énergétique.  Dans ce cas l’activité de la cimenterie va nécessiter une augmentation des combustibles, mais aussi, en raison d’une moins bonne combustion, une forte augmentation des rejets atmosphériques,  bien  plus importante qu’en simple proportion.

Il faut considérer aussi  que la production de ciment est actuellement suffisamment polluante en l’état  (combustion de brai…), compte tenu surtout de la localisation groupée dans les vallées des Paillons, des usines concernées…

            En conclusion,  il nous paraît impensable, à notre époque,  de persister à envisager de développer l’incinération des déchets.  La meilleure façon d’évoluer dans le bon sens est de ne pas envoyer de nouveaux déchets, même provisoirement, à l’incinération. Il s’agit de faire ici un réel choix de société, ouvrant la voie vers un véritable développement durable.

 

. Principe de participation, selon lequel chaque citoyen doit avoir accès aux informations relatives à l’environnement

 

Ce principe est parfait mais encore faudrait-il qu’il soit appliqué réellement par les industriels et les administrations ou collectivité locales ce qui n’est pas le cas ; par exemple, il nous a été impossible d’obtenir les quantités annuelles de rejet de CO2, H20, retombées acides, CO, etc…pour chaque année concernée  malgré toutes les promesses et les déclarations faites en réunions (CLIS…)

 

Conclusion

 

Ce projet de plan d’élimination des déchets est perfectible.

Aucune recherche prospective n’est annoncée ; nous aurions aimé trouver une étude sur les nouvelles technologies d’élimination des déchets.

 

Malgré des propositions intéressantes, telles le compostage et le recyclage, ce plan fait la part trop belle à l’incinération, ce qui va à contre courant des tendances actuelles concernant le développement durable.

 En conséquence, nous demandons la réduction progressive et rapide de l’incinération des ordures ménagères ainsi que l’abandon de tout projet d’incinération de  déchets industriels en cimenterie

 

Association Sauvegarde de l’Environnement du Canton de Levens

                                                                                    R. RICCIARDI

Association Paillons Environnement  BP 55 Contes 06391

                                                                                    M. ALDUINI

 

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